samedi 14 mai 2011

Bois & Cie : stage de menuiserie, seconde partie

Bonjour à toi lecteur, et bienvenue sur ce blog si tu le découvre !

Je vais aujourd'hui raconter la fin du stage de menuiserie que j'ai effectué grâce à l'association Bois & Cie.

Lors de mon précédent ( et aujourd'hui bien ancien ) post, je vous ai raconté comment nous avons préparé et tracé chacune des pièces de bois qui constitueront notre battant de porte de meuble.

Nous y avons dessiné les croquis, l'épure à l'échelle 1, établis la liste de débit, choisis nos pièce de bois qui ont été dégauchies, rabotées, et sur lesquelles nous avons repiqué les traits de coupe directement depuis l'épure.

Il nous reste à faire les découpes qui permettrons à toutes ces pièces de s'emboiter, puis de faire le collage et les finitions. Nous allons enfin faire sauter du copeau !

La première chose que nous allons réaliser sont les mortaises, qui n'ont plus de secret pour vous depuis mon post "Tenon et mortaise sont les deux mamelles de la menuiserie".

Dans la menuiserie moderne, l'utilisation d'outils électroportatifs et la règle. Ils permettent une grande efficacité et une grande précision.
La reine incontestée de ces machines est la défonceuse, dont on dis que les possibilités ne sont limitées que par notre imagination...

Voici donc à quoi ressemble ce saint Graal du menuisier moderne :














La défonceuse est montée sur un plateau plane qui permet de la faire glisser sur une surface régulière. Elle comporte un outil tranchant tournant à haute vitesse, la fraise, qui de part la variété de ses formes et attributs permet de multiples opérations.
Cette fraise et le moteur qui l'entrainent sont mon montés sur un système de vérin qui lui donne une mobilité verticale.
Le principe de base de la défonceuse est donc le suivant : on fait tourner la fraise, on la 'plonge' dans le bois, et on la déplace pour faire le 'trou' aux dimensions désirées.

Nous utilisons donc une défonceuse pour réaliser les mortaises.
D'une manière surprenante, la phase de réglage est la plus longue et la plus complexe. près avoir choisi et monté la fraise, nous réglons la butée de profondeur. C'est elle qui nous évite de faire un trou dans la table:














Ensuite, nous fixons notre pièce de bois sur l'établis afin qu'elle ne bouge pas pendant l'opération. Nous posons la défonceuse sur la zone à creuser, et nous mettons en place les éléments qui vont contrôler la zone qui sera creusée :














Dans le cas d'une mortaise, nous avons :
- un guide latéral (pièces noir et grise en bas , qui nous donnera une mortaise droite et parallèle à notre pièce
 - une butée de départ ( serre joint rouge )
 - une butée d'arrivé

Une fois tout cela en place, on lance, on plonge, on déplace d'une butée à l'autre, le tout est fait en 10 secondes maximum ... :



... et le résultat est impeccable ! On vois bien sur cette photo les marques faite par la pointe du trusquin . :



La défonceuse est ensuite utilisée pour faire la rainure dans la quelle se glissera le panneau de la porte.
Nouveau travail à réaliser, donc ... nouvelle configuration de la défonceuse, vous l'avez tous dis, j'en suis sur !

Cette fois, la défonceuse sera montée statiquement sous une table. La hauteur de fraise est réglée, et c'est la pièce de bois qui sera en mouvement pour ce type de travail.














Voici la réalisation de la rainure :



Le travail à la défonceuse est d'une incroyable propreté, mes premières mortaises au ciseau à bois sur ce blog n'auront pas de mal à vous en convaincre !














Voilà, nous avons maintenant deux montants qui sont prêts à recevoir les tenons des trois traverses horizontales, et les deux panneaux. Nous passons donc à la réalisation des tenons des traverses.

Encore une fois, nous utilisons la défonceuse, mais puisque le travail à faire est différent, les réglages des guides le sont aussi :













Nous avons fixé un rail métallique contre lequel la défonceuse se déplacera. Deux pièces de bois à droite et à gauche de notre pièce nous ont permis de faire quelques tests et réglages, et notre montant est prêt à se voir défoncer.

Une fois les réglages faits, la manœuvre est la même :

 
Cette opération est réalisée sur les deux faces ( les joues ) du tenon. Nous allons ensuite raccourcir ces tenons à la longueur prévue sur l'épure. Cette opération est réalisée grâce à la scie radiale à onglet :














La scie peut être levée et abaissée, mais également coulisser horizontalement ce qui donne une grande variété de coupes, qui est encore étendue par le fait que la tête est inclinable pour les coupes en biseau, et le plateau aussi peut tourner, permettant des coupes à 45° sur deux axes simultanément.














Enfin, une petite reprise au ciseau à bois nous permet d'avoir une joue de tenon parfaitement propre.














Le positionnement du tenon est vérifié ...

 
 











... et on en profite pour repiquer la largeur de la mortaise directement à la source :


Cette dernière découpe se fera à la scie, et nous permet d'arriver à une étape très satisfaisante : le montage à blanc. c'est l'assemblage de toutes les pièces ensemble, sans les fixer définitivement. Cela permet de faire un contrôle général de l'ensemble :














Les plus observateurs d'entre vous aurons noté que les longueurs des montant ne sont pas bonnes, et ils ont raison !!! En effet, elles seront coupées au tout dernier moment. Ainsi, si une des pièce ou l'ensemble venait à tomber, les coins cassés seront de toute façon coupés à la fin. Si la découpe avait déjà été faite, la pièce serait à recommencer depuis le début !

Nous touchons au but. Collage, des tenons et assemblage final des panneaux :














Il faut aller très vite, donc tout le monde s'y met :














Une fois toutes les pièces collées et assemblées, elles sont serrées :














Une petite vérification que les deux diagonales ont bien la même longueur, ce qui n'est bien sur pas tout à fait le cas :














Un ultime serre joint sur la diagonale trop longue permet de corriger ce petit centimètre malvenu qui s'est invité dans notre œuvre.

Une fois la colle séchée, nous perçons des trous sur chaque assemblage tenon mortaise afin d'y insérer une petite cheville qui assurera un complément de solidité avec la colle :














Le téton qui dépasse sera coupé à l'aide d'une scie à araser.

Voilà mesdames messieurs, l'accomplissement de toute une vie de 20 heures de stage,
un panneau de porte absolument MAGNIFIQUE !!!!

















Toutes les équipes sont parvenues à des résultats rivalisant de perfection, et la fierté du travail bien fait se lis sur les visages réjouis de tous.



Voilà qui conclus ce post. J'espère que la découverte de la fabrication d'une portion de meuble vous a plu. N'hésitez pas à me faire par de vos commentaires, ça me fait toujours énormément plaisir, et également un peu culpabiliser de mettre si longtemps entre chaque post.

Ce que je retiens tout particulièrement de ce stage, c'est à quel point il est long et compliqué de faire une pièce qui semble toute bête comme cette porte, et je suis admiratif lorsque je vois une cuisine entièrement réalisée à la main, ou bien un meuble
ancien qui après des dizaines d'années de vie n'a pas bougé d'un poil.

Oui, l’insaisissable beauté du travail manuel est peut être là : seul ceux qui prennent le temps de la regarder se rendent compte à quel point elle est éblouissante.

A bientôt !


jeudi 20 janvier 2011

Bois & Cie : stage de menuiserie, première partie



Bienvenue à toi lecteur pour une nouvelle page de mon aventure !

Tout droit de retour du XIIIème siècle où je participa à la construction d'un château fort, me voici à la découverte d'une nouvelle association dont j'ai entendu parler lors de soirées ... d'une autre association !  C'est un microcosme que je ne connais pas du tout, et j'y découvre un véritable réseau de personnes qui se côtoient et partagent du temps et du savoir autour des divers thèmes, notamment ceux qui me tiennent à cœur : la construction bois.

L'association Bois & Cie se présente en ces termes :
"
L’association Bois & Cie est née en octobre 2005 autour d'un axe majeur: le partage des savoirs et des savoir-faire autour du travail du bois. Portée par quelques membres fondateurs, la structure s'organise au départ autour d'un local-atelier, équipé d'outillage et machines mutualisés et propose à ses adhérents un espace et des temps d'échange et de partage: apprentissage et perfectionnement des techniques de mise en œuvre du bois principalement (mais aussi du cuir, des métaux) mutualisation des informations.
"

Au menu de leurs activités, des activités de formation,de réinsertion, du conseil sur l'éco-construction, des projets sur la valorisation des rebuts urbains ( bois de palettes ) et enfin un projet central de prototype d'habitation légère et démontable.


Cette association avait donc toutes les cartes en main pour m'accompagner sur le chemin du bois. Quelques coups de fils, et renseignements pris, je me suis inscrit à un stage de vingt heures de formation aux techniques de base de la menuiserie.

En attendant le stage quelques semaines, j'ai eu droit par un beau samedi bien frais à la cérémonie d'accueil : la séance de démontage de palettes à coup de pied de biche ! Le but est de récupérer de la matière première à bon marché, et de la valoriser dans divers projets tel que des bacs à compost, des toilettes sèches, ou bien des cabanes de marché démontables. 


Me voilà donc par un nouveau beau matin en direction des locaux de l'association, habillement camouflée derrière cette façade d'ancien garage :

 






La première pièce fait office d'entrepôt pour la matière première. On y croise également de l'outillage, et sur la droite un prototype de cabane. Je pense que c'est l'ancêtre du prototype d'habitation dont je vous parlais plus haut.







Ensuite, nous entrons dans la pièce principale contenant plusieurs postes de travail, et une bonne partie de l'outillage.



















Au fond se trouve une petite salle qui tiendra lieu de bureau d'étude pour notre projet.

















La première étape de de ce stage est de prendre le bon café du matin. Comme vous le constatez, les doudounes sont de rigueur, la salle n'étant que faiblement isolée. Il y règne une température glacière que la chaleur humaine des participants fait rapidement oublier.



















Présentations, rappels du contenu et des objectifs du stage, consignes de sécurité, nous rentrons dans le bois dur !

L'objectif est donc de construire un battant de porte. Pour cela, nous serons organisés par groupe de 3 ou 4 personnes, chacun réalisant son battant. Ceux-ci seront utilisés pour continuer l'ameublement le local.

Nous apprenons donc qu'il y a douze étapes pour réaliser un travail de menuiserie. Je vous les cite donc de mémoire (avec plusieurs mois de retard) en espérant ne pas raconter trop de bêtises :

  1- croquis
  2- fiche de débit
  3- épure à l'échelle 1
  4- choix des pièces de bois
  5- dégauchissage et rabotage
  6- établissement des marques de repérage
  7- repiquage des traits de coupe
  8- réalisation des assemblages( tenons, mortaises, rainures )
  9- découpe des tenons aux bonnes longueurs
10- assemblage à blanc
11- encollage
12- ponçage et vernissage

En avant donc avec le croquis général que l'on gardera sous le coude tout au long de la fabrication de notre pièce. Il doit nous indiquer la forme de l'ensemble, les types d'assemblage, les dimensions principales et le marquage de chaque pièce.

 

















Notre battant sera donc composé de deux montants (à droite et à gauche), trois traverses ( en haut, au milieu et en bas ) et deux panneaux ( au milieu des deux rectangles ).


Le marquage ( les runes mystérieuses que vous voyez sur chaque pièce ) nous permet une fois tracé sur le bois de savoir instantanément quelle pièce nous avons dans les mains, ainsi que sa position future.
On vois sur ce croquis les marques des montants de gauche et de droite que l'on ne peut confondre, quelque soit le sens dans lequel on tiens la pièce. Les marques des traverses permettent de savoir exactement dans quel ordre vertical elles seront disposées.
On vois enfin les marques permettant de reconnaitre les mortaises ( tout à droite ), et les tenons (sur chaque traverse).


Ce croquis étant fait, nous avons une bonne idée du bois qui sera nécessaire pour le réaliser : deux montants, trois traverses. Nous établissons donc la fiche de débit qui liste les pièces nécessaires ainsi que leur dimensions. Celle ci peut servir de bon de commande pour notre fournisseur, ou bien de liste de tache pour nous même puisque nous allons les tailler.



















On note la pièce d'essai qui permettra de calibrer nos outils, et on pourrais rajouter si le budget nous le permettais une pièce supplémentaire de chaque type, en cas d'erreur, il serait dommage de stopper les travaux car une pièce nous manque, et qu'il faille relancer une commande.

Étant des menuisiers chevronnés du haut de nos ... hum ... deux bonnes heures dans le métier, nous somme assez confiants pour ne pas avoir besoin de pièce de secours.

Nous continuons la phase d'étude avec le tracé de l'épure à l'échelle 1. L'objectif de celle ci est de représenter exactement ce que sera notre pièce finale, avec ses dimensions réelles.

Tout commence donc par tracer le premier angle droit avec ... une règle un et compas bien entendu !

Il existe plusieurs techniques pour réaliser un angle droit. La première dite du 3-4-5 nécessite une règle graduée. Elle consiste à réaliser un triangle dont les cotés sont de proportion 3,4 et 5. Par exemple, au vu des dimensions de notre pièce, nous pourrions prendre 30, 40 et 50 cm.

Les plus mathématiciens d'entre vous auront noté que 3² + 4² = 5², ce qui rappelle fortement les propos obscurs de ce bon vieux Pythagore.
Pour rappel, la réciproque de son théorème nous dis que :

"
Si dans un triangle, la somme des carrés des longueurs de deux côtés est égale au carré de la longueur du troisième côté, alors ce triangle est rectangle et l'angle droit est l'angle opposé au plus grand côté.
"

A la bonne heure ! Mais étant des menuisiers accomplis, nous pouvons nous passer de règle graduée grâce à une seconde technique mettant en œuvre de nouveau la géométrie.



Nous traçons une ligne entre deux points A et B.
A l'aide du compas, nous créons un triangle ayant  trois cotés de longueurs égale à AB.
C'est un triangle équilatéral ! Ses angles valent donc tous 60°.
Nous prolongeons la ligne BC. Cela crée un angle complémentaire de 120° avec AC
Nous y reportons la longueur CB, obtenant le point D.
Le triangle ACD obtenu possède deux cotés de longueurs égales, il est donc isocèle !
L'angle à son sommet valant 120°, les deux angles à ses bases valent 30°.
L'angle entre DA et AB vaut donc 30°+60° soit 90°, il est droit, la science est formelle sur ce point !
Après une franche partie de rigolade à constater que la pratique diffère légèrement de la théorie dans ce cas là, nous parvenons tout de même à établir un premier angle droit respectable.

Les autres tracés suivent jusqu'à reproduire intégralement notre croquis initial avec des côtes correctes comme le montre (presque) cette photo :




Nous voyons ici quelques détails des assemblages : la mortaise, le tenon (un peu plus court) et la rainure dans laquelle se glissera le panneau.




La conception étant terminée, la fiche de débit établie, nous allons en quête des pièces de bois nécessaires. Celles-ci sont issues de palettes ayant subit avec succès la phase de démontage.

L'aspect brut du matériel, et ses dimensions approximatives  ne permettant pas de réaliser un travail de menuiserie, la première étape sera de les préparer.

La première machine que nous utilisons est la dégauchisseuse :




Des lames sont montées sur un axe tournant à grande vitesse. La pièce de bois est glissée le long d'un plateau sur lequel affleurent les lames. Celles-ci enlèvent donc (selon le réglage) quelques millimètre de bois à chaque passage. Ainsi, au bout de plusieurs passages sur le plateau parfaitement plat, nous obtenons une surface parfaitement plane.

Voici la position académique ayant l'avantage (non négligeable) de garantir la récupération de la totalité de vos doigts en fin de dégauchissage :



















Je vous la recommande donc fortement.
Un quart de tour de la pièce et rebelote : nous obtenons 2 faces parfaitement planes, formant un angle de précisément 90°.




Pour l'étape suivante, la raboteuse entre en jeu. Également constituée de lames sur un axe rotatif, elle attaque cette fois le bois par le haut :





















La hauteur du plateau sur lequel glisse le bois étant réglable, cette machine permet de créer une face parfaitement plane, parallèle à la face opposée et à l'épaisseur qui est souhaitée.

Ainsi, grâce à ces deux outils, nous obtenons une pièce dont les quatre faces sont parfaitement planes, parallèles deux à deux, et formant des angles de 90°.
C'est le minimum nécessaire pour espérer réaliser un ouvrage digne de ce nom !

Ces étapes sont donc réalisées pour chacune des six pièces de notre fiche de débit.
Chacune sera ensuite choisie en fonction de ses dessins, couleurs, nœuds, strilles pour occuper une place dans le montage. Les marques de notre croquis leurs sont alors apposées au crayon.

Il est maintenant temps d'effectuer sur celles-ci les tracés grâces auxquels coupes, tenons, mortaises et rainures seront réalisés.

Cela est fait directement sur notre épure. La pièce est posée à sa place, et les traits sont repiqués directement dessus.

Sur cette photo, on repique la hauteur du montant droit. Les petits 'v' sur chaque faces rappellent quel est le coté du trait qui sera enlevé lors de la découpe :




















Sur celle-ci, on vois le bout du tenon sur la gauche, et son épaulement sur la droite:








Chacun des traits de coupe seront ainsi reporté sur les pièces avant de passer à la phase de découpe.

Pour les rainures qui accueilleront les panneaux à l'intérieur du cadre,  le tracé est un peu plus compliqué, puisque nous sommes sur la tranche de notre pièce de bois, et que nous devons réaliser un trait relativement long.

Nous utilisons alors un nouvel outil : le trusquin.
Celui-ci est composé d'un socle contre lequel glisse la pièce de bois à tracer, et d'une partie mobile, coulissant dans ce socle, et munie d'une pointe métallique.
Une fois l'écartement entre la pointe et le socle finement réglé, la partie mobile est serrée à l'aide d'une vis. Il ne reste plus qu'à marquer le bois avec la pointe sur toute la longueur nécessaire en faisant glisser le trusquin le long de la pièce :

 


Voilà pour cette première partie de stage. Nous avons obtenu une série de pièce qu'il va maintenant falloir travailler pour les assembler.
Ce sera l'objet de mon prochain post. Je vais essayer de raccourcir un peu le délai de rédaction car j'ai beaucoup de choses à vous racontez, mais je ne devrai à aucun prix sacrifier la qualité, ce serai prendre une bien mauvaise voie pour les aventures à venir.

Puissiez vous de la même façon faire le choix de prendre le temps de privilégier les choses bien faites, au détriment du rythme fou que les temps actuels semblent nous imposer.