Vous vous souvenez surement de mon dernier chantier participatif à Dremil Lafarge au cours duquel j'ai travaillé avec Sébastien à isoler sa toiture avec des bottes de pailles.
Celui ci m'a parlé du charpentier et ami qui a réalisé sa charpente. Il m'a également parlé de plusieurs association toulousaines gravitant dans le monde de l'éco-construction et tout un tas d'autre domaines.
Une de ces associations, Friture, propose notamment des stages pratiques, sur la construction d'ossatures bois, de toilettes sèches, et tout un tas d'autres sujet gravitant autour de ces domaines.
Après un peu de navigations sur les sites web de ces associations, j'ai découvert que le prochain stage en date était la mise en œuvre d’une couverture en bardeaux sciés et ventilés.
Ni une ni deux, voilà votre dévoué serviteur inscrit, et qui se présente à la ferme pédagogique de Bouzigue, lieu où se déroule le stage.
"Un lieu ressource pour les associations de promotion à l’éducation à l’environnement ", c'est en ces mots que se présente la ferme de Bouzigue en ajoutant : " Elle contribue à créer une dynamique locale, à favoriser un développement socio-culturel autour d’animation et d’activité en accord avec l’objet de l’association."
Cette ferme est une bâtisse ancienne, au style bien particulier des campagnes toulousaines, qui nous accueille par cette matinée humide et grisâtre.
La demi-douzaine de stagiaires arrivent au compte goutte, et visiblement beaucoup de monde se connais déjà.
Une majorité d'entre eux est actif dans le tissu associatif local, où ils se côtoient régulièrement.
La matinée fus consacrée à la partie théorique dont voici un résumé succin :
"Le bardeau est un revêtement permettant de protéger des intempéries les toitures et les façades"
Dans le cas qui nous concerne, nous allons aborder le bardeau de bois (bien sur) employé à la couverture du pan de toit d'une petite construction qui servira de buvette ou lieu d'accueil pour de futures manifestations.
La première moitié de la journée est consacrée à la partie théorique : les bardeaux, leur histoire, leur utilisation encore, principalement dans certains canton suisses sous le nom de tavillon.
Nous avons également regardé une video (pluie oblige) montrant les tavillonneurs suisse au travail.
C'est un travail d'orfèvre qui démarre sur l'arbre encore sur pied. Soigneusement sélectionné, il est abattu, débité, puis les tavaillons sont fendus en suivant la fibre, et entreposés pour séchage.
Bien entendu, tout ce travail est fait avec les outils de l'ancien temps et les méthodes qui s'y rapportent.
Les ventres criant famine ( mais pas à cause du travail abattu en cette pluvieuse matinée) obtiennent finalement gain de cause, et nous nous dirigeons vers la cuisine.
La nous attends un repas bio dont voici un succin résumé :
Boisson à base d'ortie en guise d'apéritif, puis soupe d'orties agrémentée de graines grillées.
S'en suis une série de tourtes maison comprenant des orties de nouveau, ainsi que du potiron, des légumes divers, une tourte agrémentée de roquefort et de noix, ainsi que diverses salades.
Ce repas fut un délice du début à la fin. C'est assez surprennant de voir la varité de choses que l'on peut faire avec la production locale et un peu de savoir faire.
Les discussions vont bon train, à gauche sur les divers voyages au tour du monde sans le sou par les globe trotters, à droite sur la dernière fournée de pain bio réalisé par l'un des convives dans un four restauré dans squat pas très loin.
Cette expérience fu assez troublante, car je me sentais vraiment venir d'un autre monde. Ici, la simplicité et l'humanité règne.
L'un des participants a fait dans la pub pour une grande boite parisienne pendant 10 ans. Il a tout laché, et me raconte qu'il n'a pas eu une seule journée d'emplois salariée depuis 3 ans, et pourtant il vie une vie bien remplie.
Tout cela me fait bien un peu réver, mais je ne suis pas encore assez ouvert d'esprit pour m'y voir toute la vie.
Une fois tous ces mets engloutis, et ces histoires en têtes, nous pointons le nez dehors pour constater que les nuages ont terminé leur travail. Nous allons enfin pouvoir commencer le notre.
Deux ateliers furent montés pour réaliser le travail : la découpe des bardeaux, et la pose.
Le stand de découpe par de planches d'environ 4 mètres qui sont découpées, et percées :
Le perçage est nécessaire, car les clous sont posés, comme nous le verrons plus loin, assez près du bord, et donc le bardeau se fend si on tente de clouer directement.
Non loin de la, les apprentis charpentiers s'activent à la pose.
Le principe d'une toiture en barbeaux est de superposer des bardeaux de manière à ce que l'eau s'écoule sans jamais traverser la toiture.
Nous voyons ici les deux litteaux (longue pièces de bois de petite section presque carré) qui soutiennnt chaque bardeau. Un en tête, et un autre quarante centimètres plus bas.
La toiture se monte donc du bas vers le haut.
Entre deux bardeaux, il doit y avoir un écart (règlementaire de 6mm). Dans notre cas, nous travaillons avec du bois encore très humide, nous ne laissons pas d'espace.
Une fois le bois plus sec, il va se rétracter en largeur (mais pas en longueur), créant ainsi cet espace.
Les bardeaux étant décalés d'une couche à l'autre, l'eau peux ruisseler jusqu'au sol sans traverser le toit :
Voici une vue de travers montrant le système d'empilement des couches :
Le soleil commence à décliner, et la fraicheur arrive, la journée touche à sa fin.
Le résultat final est plutôt réussi, et surtout il met en relief la video vue le matin, dans laquelle des chef d'oeuvres de toitures étaient exposées, et c'est à ce moment qu'on prends conscience de la qualité incroyable du travail des tavillonneurs suisses, et surtout de la modestie du notre !
Voici quelques photos de ces oeuvres :
Selon la tradition, chaque portion de toit est recouverte par pas moins de neuf couches de bois !
Les tavaillons se superposent trois fois latéralement, et trois fois verticalement.
La quantité de travail nécessaire pour réaliser une toiture est inimaginable, comme le laisse supposer cette photo :
Voici pour finir une superbe video d'époque montrant un tavilloneur à l'oeuvre :
http://archives.tsr.ch/dossier-metiers/construction-tavillon
Une nouvelle expérience s'ajoute à mon carnet de voyage. Celle-ci fû également faite de nouvelles rencontres : un charpentier qui se spécialise dans l'éco-construction, une association qui organise des formations théoriques et pratiques, une ferme eco-citoyenne, et des aventuriers de la vie !
Les discussions de la journée m'ont de nouveau mises sur la piste des Compagnons du devoir du tour de France. Il semble qu'il soit possible de suivre des formations en charpente auprès d'eux.
Je note donc sur mon carnet de voyage qu'une étape du coté du compagnonnage serait surement très instructive et utile pour me guider sur la route.
Je vous quitte donc une fois de plus avec de nouvelles destinations en tête, et c'est bien là l'essentiel dans un voyage, d'avoir une nouvelle destination en vue !